Confiance, Respect, Empathie et Authenticité sont les mots-clés de l’ACP, qui laisse le patient guider lui-même son évolution
La méthode L’ACP, méthode mise au point par le célèbre psychologue américainCarl Rogers, se veut centrée sur la personne et non sur un problème, une maladie ou un symptôme particulier. Elle repose sur la conviction que l’homme possède un fort potentiel d’évolution et d’épanouissement inné qui se développe de lui-même pour peu qu’il bénéficie d’un contexte favorable. Il s’agit donc de relancer ce processus spontané qui a été entravé. Le thérapeute s’efforce d’instaurer un climat sécurisant, de faciliter l’expression de son "client", de lui apprendre à se fier à ce qu’il ressent pour développer son autonomie et améliorer ses relations avec les autres. Carl Rogers a remplacé le mot patient par "client" pour souligner le rôle actif de ce dernier : lui seul sait ce qui lui convient, c’est donc à lui de mener la démarche thérapeutique. Le thérapeute ne peut en aucun cas se substituer à lui, c’est pourquoi il n’impose rien, ne conseille et n’interprète pas, mais accompagne la personne dans son travail d’évolution et de changement.
L’immense popularité de l’ACP tient autant à la pensée révolutionnaire qu’au rayonnement personnel de Carl Rogers. Né en 1902 aux Etats-Unis, ce psychopédagogue a rejeté les principaux courants psychologiques de son époque, la psychanalyse freudienne et le behaviorisme (étude des comportements), pour forger sa propre théorie. C’est le premier praticien à s’être livré à des enregistrements sonores et vidéo de ses séances, et à entreprendre des recherches sur le processus thérapeutique et ses résultats. C’est également lui qui a instauré la supervision des thérapeutes. Privilégiant les qualités personnelles aux diplômes, il a ouvert la psychothérapie aux professions non médicales et développé la relation d’aide (counseling). Une approche qui devient célèbre dans les années 60 sous le nom de méthode "non directive". Auteur, conférencier, chercheur, Carl Rogers s’est intéressé à tout ce qui concerne les relations humaines : le couple, la famille, l’enseignement, la vie sociale et politique… Son travail a totalement transformé l’art de l’écoute, non seulement dans le domaine des professions d’aide, mais aussi dans celui de de la communication, de l’entreprise et du commerce. Il s’est éteint en 1987, alors que son nom venait d’être proposé pour le prix Nobel de la paix.
Déroulement d’une séance Il n’existe pas de cure type. Tout dépend du vécu actuel du client, toujours privilégié par rapport à son histoire passée. Le thérapeute va l’écouter avec sympathie, dans une relation de confiance et d’authenticité. (On est loin de la "neutralité" des psychanalystes). Placé face à son client, pour que ce dernier puisse voir ses expressions, il doit observer trois attitudes fondamentales précisément définies par Carl Rogers. La congruence, ou l’accord avec lui-même (coïncidence entre ses besoins, ses désirs, la conscience qu’il en a et l’expression qu’il en donne). Elle incitera le client à déjouer ses mécanismes de défense pour rétablir sa propre congruence. La compréhension empathique. Tout en restant lui-même, le thérapeute cherche à se mettre à la place du client, à entrer dans son univers et ses sentiments, en s’efforçant de les voir sous le même angle que lui. Aussi, lorsque celui-ci souffre, la compassion qu’il peut lire chez le thérapeute lui donne à la fois le sentiment d’être compris et la sensation que sa douleur est partagée, donc allégée. L’acceptation positive inconditionnelle, quoi que le client dise ou vive. D’après Carl Rogers, la majorité des problèmes psychologiques provient du fait qu’il est rare d’avoir reçu une telle acceptation de la part de ses parents dans la petite enfance. Raison pour laquelle nombreux sont ceux qui grandissent en cherchant avant tout à plaire aux autres, en sacrifiant leur personnalité et leurs propres désirs. Il est donc essentiel que le client se sente respecté sans jamais avoir l’impression d’être jugé ou évalué selon une théorie quelconque. La confiance, source de liberté d’expression et de relation dynamique, est en effet l’élément moteur de la thérapie. Un exemple : le thérapeute peut dire qu’il vient de ressentir la souffrance de son client physiquement, au niveau du ventre, comme quelque chose de profond qui s’ouvrait en lui, avec un désir de s’y laisser aller. Alerté par cette réflexion, le client pourra alors comparer cette sensation avec sa propre expérience afin de s’interroger sur le sens profond de sa souffrance. En règle générale, le thérapeute pose peu de questions. Il peut rester silencieux ou prendre la parole pour répondre à une demande, attirer l’attention de son client sur un point important, ou encore vérifier avec lui la compréhension qu’il a de ses difficultés. Tout vient du client, de ses propres ressources, l’explication de son problème comme la façon de le résoudre. Mais il n’est plus livré à lui-même, le thérapeute est à ses côtés.
Indications Peut consulter toute personne qui souffre d’un mal être (stress, dépression, anxiété, difficultés familiales, conjugales ou professionnelles…), de troubles d’ordre psychosomatique ou d’incapacité à communiquer, et qui souhaite en parler à quelqu’un… qui lui réponde. Mais il faut être suffisamment motivé pour, au-delà d’un problème ponctuel, accepter de participer réellement à un échange client-thérapeute authentique.
Contre-indications Les personnes qui souffrent de phobies et celles qui désirent seulement se libérer d’un problème ponctuel ne tireront pas de profit immédiat de l’ACP. Certains désordres psychologiques graves, telles les psychoses avec une perte importante du sens de la réalité, demandent une approche plus spécialisée à laquelle ne sont pas formés tous les thérapeutes rogériens.
Prix et durée des séances Le prix, négociable, oscille entre 40 et 80 euros pour des séances d’une heure environ. La durée de la thérapie varie d’une dizaine à une cinquantaine de séances, et c’est le client qui impose le rythme des entretiens (d’un par semaine à un tous les quinze jours).
Témoignage Christian, 39 ans : « J’avais peur de construire un couple, et j’entretenais des relations vouées à l’échec » « J’avais déjà eu l’occasion de me former à la relation d’aide dans le cadre de mon activité professionnelle. Lorsque ma compagne m’a quitté, je me suis naturellement tourné vers cette thérapie. C’était la quatrième rupture que je subissais en une dizaine d’années. Or, construire un couple était ce que je désirais le plus au monde… J’avais besoin d’aide. Je me suis adressé à une thérapeute femme qui m’inspirait confiance. Le plus important a été l’impression de liberté que j’ai éprouvée. Rien ne m’a été imposé. Je pouvais même choisir mon siège et changer de place. Elle respectait mes flottements, et j’ai ressenti qu’elle accordait la plus grande importance à ce que je vivais et à qui j’étais. J’étais entendu, pas seulement à travers mes mots, mais aussi dans mes sentiments. Avec elle, j’ai pu extérioriser mes émotions, me laisser aller à des pleurs salvateurs que je n’arrivais pas à sortir seul. Elle était toujours près de moi et avec moi. Je la sentais particulièrement proche, comme lorsqu’elle m’a tendu spontanément la main au moment où j’en avais le plus besoin. Elle parlait peu, mais ce qu’elle me disait était juste et précis. Cela résonnait en moi. J’ai compris que j’entretenais des relations vouées à l’échec et que la peur de construire un couple m’habitait. A chaque fois, je choisissais des femmes qui avaient de grosses difficultés avec les hommes pour jouer les sauveurs. Je voulais les aider pour éviter de voir quelle partie de moi-même avait besoin d’être aidée. Il a suffi d’une dizaine de séances pour que je ne sois plus pris dans cet engrenage fatal. Aujourd’hui, je me sens libre d’essayer un autre type de relations.
(présentation inspirée d'un article paru dans le magazine Psychologies - septembre 98)